mardi 9 février 2021

Jean-Claude Carrière : un artiste a disparu, pas son souffle

 Crédits STUDIO HARCOURT PARIS
 
Jean-Claude carrière est mort ce 8 février 2021, à l’âge de quatre-vingt-neuf ans.

S’il existait un prix Nobel du scénario de cinéma, Jean-Claude Carrière l’aurait mérité plusieurs fois.

En effet, il a écrit des dizaines de scénarios pour quelques-uns des cinéastes les plus connus du monde entier. La liste complète serait trop longue, mais il suffit de citer Pierre Etaix, Louis Malle, Jacques Deray, Milos Forman (Les fantômes de Goya), Christian de Challonge (L’alliance, d’après son propre roman), Marco Ferreri, Ado Kyrou (Le moine, d’après M.G. Lewis, adapté avec Luis Bunuel), Alain Corneau, Patrice Chéreau, Robert Benayoun, Jean-Luc Godard, Peter Brook, Nagisa Oshima, Volker Sclöndorff (Le tambour, d’après Günter Grass), Andrzej Wajda, Jean-Paul Rappeneau, Michael Haneke (Le ruban blanc), Philippe Garrel, Jean-Daniel Verhaege (La controverse de Valladolid, adapté de son roman éponyme)… Excusez du peu !

Pour (et avec) Luis Bunuel, il a écrit six scénarios : Le journal d’une femme de chambre, Belle de jour, La voie Lactée, Le charme discret de la bourgeoisie, Le fantôme de la liberté, Cet obscur objet du désir.

Né en 1931 dans une famille de viticulteurs de l’Hérault (le vin est un de ses sujets de prédilection), il commence en réalisant deux courts métrages avec Pierre Etaix, puis en écrivant des romans fantastiques au Fleuve Noir (la série des Frankenstein, sous le nom de Benoit Becker), et enfin des scénarios pour le cinéma, des romans, des pièces de théâtre.

Il a écrit aussi de nombreux ouvrages sur des sujets très divers : Humour 1900 (anthologie), Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugement, Le Livre des Bizarres, Les mots et la chose : le grand livre des petits mots inconvenants, Dictionnaire amoureux de l’Inde, L’argent sa vie sa mort, des ouvrages autobiographiques (Le vin bourru, Mémoire  espagnole) de philosophie, des livres sur la religion (lui qui se déclarait athée, comme son ami Bunuel, dont il a co-rédigé la biographie Mon dernier soupir), des poèmes (Cent un limericks français, aux Editions de la Bougie du Sapeur), des traductions (Le clou brûlant de José Bergamin), etc.

Il aurait aussi mérité un prix Nobel de la multi-activité : en plus de tout cela, il a chanté, joué comme acteur, tenu des chroniques à la radio (Les A-côtés, Chroniques  matinales, recueil de ses matinales de France-Inter)….

Du  Charme discret de la bourgeoisie (1972),  ce savoureux dialogue entre une bourgeoise et un colonel de l’armée française :

Mme Thévenot (Delphine Seyrig) : Mais qu’est-ce que vous fumez, colonel ?

Le colonel (Claude Piéplu) : De la marijuana. Vous en voulez ?

Mme Thévenot : Oh non merci. (…)

Le colonel : La marijuana n’est pas une drogue. Regardez ce qui se passe au Vietnam, par exemple. Du général en chef au simple soldat, tout le monde fume.

Mme Thévenot : Mais le résultat, c’est qu’ils bombardent leurs propres troupes au moins une fois par semaine.

Le colonel : Mais non, madame. S’ils bombardent leurs propres troupes, c’est qu’ils ont leurs raisons. 

 

Un lien vers l'émission Champs magnétiques, diffusée le 8 avril 1986. L’humoriste genevois Bernard Haller offre aux téléspectateurs une balade dans son univers. Il nous entraîne chez ses amis, comme le talentueux scénariste, auteur dramatique, écrivain et comédien Jean-Claude Carrière qui vient de publier « Le livre des bizarres », en collaboration avec l’écrivain Guy Bechtel...

 

Encore un portrait, autrement bizarre, celui proposé par Antoine de Caunes, à l'occasion d'une de ses Pignolades pour l'émission Nulle Part Ailleurs sur Canal+, en 1990 :


Et un lien vers une playlist où vous pourrez écouter à loisir des histoires de... Jean-Claude Carrière :

 

                                     2016 : en parrain du Livre à Metz (photo archives Républicain Lorrain Gilles Wirtz / Droits réservés)

Par Etienne

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